Mektoub my Love : Canto Due


Mektoub my Love : Canto Due
Réalisateur :
Abdellatif Kechiche
Pays d'origine :
FR
Titre original :
Mektoub my Love (Canto 2)
Durée :
2h14
Année :
2025
Date de sortie nationale :
03/12/2025
Genre :
DR,RO
Casting :
Shaïn Boumedine, Ophélie Bau, Jessica Pennington…
Synopsis :
Amin revient à Sète après ses études à Paris, rêvant toujours de cinéma. Un producteur Américain en vacance s’intéresse par hasard à son projet, Les Principes essentiels de l’existence universelle, et veut que sa femme, Jess, en soit l’héroïne. Mais le destin, capricieux, impose ses propres règles.
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Dim 14 décembre
10:45 et 20:30
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Mar 16 décembre
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Rennes
Sam 13 décembre
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Dim 14 décembre
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Lun 15 décembre
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Mar 16 décembre
18:00
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sorti le 03/12/2025

Tourné à l’été 2016, le projet le plus ambitieux d’Abdellatif Kechiche est aussi celui qui a remis en jeu sa carrière et sa boîte de production Quat’sous. Fort du succès de La vie d’Adèle, le réalisateur franco-tunisien se lance dans l’adaptation libre du livre La Blessure, la vraie de François Bégaudeau pour en faire une fresque cinématographique. Sorti en 2017, le premier volet sous-titré « Canto Uno », invite à une atmosphère de vacances chaleureuse en suivant un groupe de personnages terriblement attachants que Kechiche filme avec une sensualité poétique. Les nombreuses heures de rushs de ce premier tournage ont donné lieu à un film de transition sous-titré « Intermezzo » qui n’est jamais sorti, enterré par son unique diffusion baignée de scandale à Cannes en 2019.

Alors que tout espoir de voir la suite de ce morceau de vie semblait perdu, Kechiche a monté, toujours à partir des rushs de l’été 2016, un troisième film intitulé « Canto Due ». Projeté en sélection officielle du Festival de Locarno, le film se retrouve distribué par Pathé qui lui ouvre enfin les portes des salles de cinéma. Conscient que les années ont passé depuis la sortie du premier film, Kechiche prend le temps de réintroduire la famille d’Amin et les personnages principaux qui gravitent autour en les présentant naturellement au sein de la diégèse par leur rencontre avec un couple d’Américains puis avec celle d’une jeune Parisienne dans une scène de plage qui demeure l’un des seuls restes d’Intermezzo. Malgré son appartenance à une saga, le film est donc largement accessible à un nouveau public.

L’histoire reprend en septembre 1994, Amin (Shaïn Boumedine) abandonne ses études de médecine et tente de se lancer dans le cinéma, tandis qu'Ophélie (Ophélie Bau) est tiraillée entre Clément, l'homme avec qui elle doit se marier, et Tony (Salim Kechiouche), cousin d’Amin, dragueur invétéré. Deux Américains, une actrice (Jessica Pennington) et son mari producteur (André Jacobs), arrivent soudainement dans le restaurant familial de Sète, créant espoirs, rejets et tentations.

Entre le jeu impressionnant d’une ribambelle d’acteurs très peu connus et pourtant parfaitement dirigés et le style de mise en scène quasiment documentaire, l’immersion est totale. Sans cesse embarquée sur l’épaule du cadreur, la caméra suit les mouvements des personnages et les filme en gros plan afin de capter seulement les visages et toutes les expressions qui s’y dessinent. À l’instar des lumières qui ne sont jamais réhaussées par des projecteurs pour bien éclairer les acteurs, le son est très peu mixé, obligeant parfois notre oreille à se concentrer pour suivre un dialogue noyé par d’autres personnages ou par une musique.

Juxtaposant des scènes de vie, le réalisateur donne le temps aux dialogues de se dérouler naturellement, laissant place aux tics de langage des personnages et maniant habilement les aller-retours entre français et anglais dans certains échanges. Insupportable dans ses premières scènes, l’actrice américaine devient rapidement aussi attachante que les autres, à mesure que sa relation avec son mari est explorée. Alors qu’Amin réalise doucement que voir son scénario produit à Hollywood est loin du rêve décrit par son cousin, les relations entre les personnages se déploient jusqu’au climax tout en tension, avec encore une fois Tony au centre du problème.

[SPOILERS]
En plus d’esquisser un discours sur l’émancipation féminine à travers les personnages de l’actrice américaine face à l’emprise de son mari bien plus âgé et d’Ophélie qui organise son avortement, le réalisateur dénonce le racisme d’une police qui se permet d’interroger un jeune homme typé maghrébin avec une brutalité illégale. Si le dernier acte semble rejoindre les carcans d’un scénario plus classique, quittant la rythmique flottante des vacances, son traitement terre à terre à la fois par le personnel hospitalier mais aussi par les réactions des patients permet de rester juste. Plus qu’à espérer ne pas avoir à attendre 8 ans de plus pour voir où ce cliffhanger déroutant mènera et si seront tenues, les promesses de Mektoub my Love : Canto Due.

Gwendal Ollivier