sorti le 18/06/2025
Comme dans la réalité de notre monde, près de trente ans se sont écoulés dans l’univers du film, depuis que le virus s'est échappé d'un laboratoire d'armes biologiques. Malgré la mise en quarantaine impitoyable de l’Angleterre, plus isolée que jamais du reste du monde, certains ont trouvé le moyen de survivre parmi les infectés. L'un de ces groupes de survivants vit sur une petite île reliée au continent par une chaussée unique.
De retour à la réalisation, Danny Boyle abandonne les caméras DV du premier film et leur esthétique salement pixelisée pour des iPhones suréquipés de lentilles, pour une esthétique plus propre mais tout de même étrangement familière. Si le choix du format très large du cadre (2,76:1) donne vie à des plans magnifiques jouant sur l’ombre chinoise de l’alpha qui observe ou les passages complexes de la chaussée qui mène à l’île, il va toutefois à l’encontre de l’esthétique familière de l’image rendue par un iPhone. Un cadre plus resserré aurait pu nous rapprocher davantage des humains notamment dans toutes les scènes d’interactions entre mère et fils où un tiers du cadre semble régulièrement vide.
Dans la même idée que les caméras DV qui permettaient de couvrir un maximum d’angles d’un Londres déserté, le réalisateur multiplie le nombre d’iPhones dans les scènes d’actions, au service d’un montage très cut particulièrement immersif. Aussi singulier que l’ambiance de la bande annonce, le premier départ de l’île est entrecoupé d’extraits de documentaires de guerre et l’espace sonore est noyé par le vieil enregistrement d’un poème qui retranscrit parfaitement la montée d’adrénaline des personnages. Après une tension tenue pendant toute sa première partie, le film opère un tournant bienvenu qui renouvelle la quête du jeune Spike, interprété par le très prometteur Alfie Williams.
À l’écriture, la patte d’Alex Garland se ressent à travers le personnage viril et tactique du père (Aaron Taylor-Johnson), puis du militaire suédois et sa copine refaite ainsi qu’aux infectés alpha et leur sexe gigantesque, qui peuvent à eux trois être interprétés comme une critique de la masculinité toxique. Mais contrairement au propos sans nuance de Men, tous les hommes ne sont pas intrinsèquement mauvais. Le personnage du Dr Kelson (Ralph Fiennes) apporte ainsi une vision poétique de la valeur de la vie dans cet univers, avec une forme de nihilisme quant au destin de la mère (Jodie Comer). Au centre du récit, Spike tire des enseignements de chacune des figures adultes du film, forgeant sa force au combat auprès de son père, sa morale plutôt du côté de sa mère et son acceptation de la mort auprès du Dr Kelson.
Enfin, l’ouverture du film montrant un massacre d’enfants sur fond de Teletubbies trouve tardivement son sens dans la séquence finale qui détonne en termes de style, se rapprochant davantage de Trainspotting, autre univers de Danny Boyle. Annonçant une suite déjà tournée et réalisée par Nia DaCosta qui avait commis The Marvels, cette scène opère une rupture de ton radicale qui promet un deuxième volet plus pulp à cette histoire pensée comme une trilogie 28 ans plus tard.
Gwendal Ollivier