La Salle des profs


La Salle des profs
Réalisateur :
Ilker Çatak
Pays d'origine :
AL
Titre original :
Das Lehrerzimmer
Durée :
1h34
Année :
2023
Date de sortie nationale :
06/03/2024
Genre :
DR
Casting :
Leonie Benesch, Michael Klammer, Rafael Stachowiak…
Synopsis :
Deutscher Filmpreis 2024 du meilleur film, meilleure réalisation, meilleur scénario et meilleure actrice

Alors qu'une série de vols a lieu en salle des profs, Carla Nowak mène l'enquête dans le collège où elle enseigne. Très vite, tout l'établissement est ébranlé par ses découvertes.
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sorti le 06/03/2024

Avec les Deutscher Filmpreis du meilleur film, meilleure réalisation, meilleur scénario et meilleure actrice pour Leonie Benesch ainsi qu’une nomination à l'Oscar du meilleur film étranger, le film allemand d’Ilker Çatak avait de quoi attirer. Fraîchement arrivée dans un lycée a priori sans problème, Carla est une enseignante discrète qui tente de captiver l’attention de ses élèves par de nombreux rituels et questionnements. Exposant brillamment le quotidien de sa protagoniste, le réalisateur introduit l'élément déclencheur comme un évènement anodin qui s'apprête pourtant à faire passer le film d'un simple portrait de profession à un slow burn.

Portée par son actrice principale Leonie Benesch, le métrage tient énormément à sa performance, en particulier dans ce qu’elle n’exprime pas ; les pensées réprimées de sa personnage et la maîtrise de soi dont elle fait preuve face aux assauts de son entourage. Face à elle, professeurs et membres de l’administration deviennent des ennemis tandis que les élèves flottent dans un entre-deux portant l’opposition moral de Carla, tiraillée entre ses principes éducatifs et le retour à la normale. Malgré des passages complexes à jouer les enfants livrent des performances parfaitement crédibles, preuve d’une direction d’acteur impeccable.

De scène en scène, le réalisateur maintient une intensité en renouvelant sans cesse ses montées en tension par l'accumulation de situations qui enfoncent toujours davantage la professeure. Par son format 1,33:1 et son utilisation de grands angles discrets, le métrage étouffe Carla en offrant une proximité dérangeante avec la caméra au sein d'un cadre étroit. Notes métronomiques coupées par des frottements de cordes et des coups de piano irréguliers, la musique retranscrit le stress d’une personnage qui n’en laisse rien paraître, conservant cette attitude discrète alors même que tous les projecteurs se retrouvent braqués sur elle.

Dans ce lycée public de bon quartier, la ligne politique semble évidente et est pourtant naturellement remise en question par certains professeurs (ceux qui accusent par peur contre ceux qui portent la tolérance en valeur suprême). De même, les élèves du journal, éduqués à défendre la liberté d'expression et à se battre contre la stigmatisation, prennent à cœur ses valeurs de la République et les retournent contre l'enseignante pour devenir, sans s'en rendre compte, de petits dictateurs de la pensée.

Ilker Çatak dépeint ainsi les failles discrètes du milieu éminemment politique de l’école. D'un geste banal et pourtant symbolique, il déroule une intrigue sur la valeur de la parole selon le statut de l’orateur, questionne la surveillance par vidéo et dénonce la répercussion des problèmes des adultes sur les élèves, en faisant complètement déborder une situation qui aurait dû rester entre les quatre murs de la salle des profs.

Gwendal Ollivier